Un peu de micromagie

Le récent championnat du monde couru intramuros a aiguisé les appétits régatiers et laissé poindre des revanches au fond de certaines gorges au regard de travers.

Des comptes pourraient se régler à la déloyale et alors là tout est permis.

Et pourquoi pas entre les fourches tordues de la magie noire, bien noire, bien rancunière, labellisée pure crapaud, de celle qui se pratique à l’abri des chaudrons dans certains cockpits à la faveur d’une lune bien choisie. La rumeur circule que serait assez bien maîtrisé un sort à jeter à distance, à cheval sur le balai de pont, qui provoquerait le décrochage brutal de la dérive vers l’abîme dès que le bateau envoûté survole un fond de plus de vingt toises. Les instigateurs seraient facilement repérables, qui se précipiteraient vers le malheureux concurrent pour lui demander s’il a besoin d’aide.

Sorcellerie et cynisme théâtral font généralement bon ménage.

Où veux-je en venir ?

Concourir au lac d’argent n’est pas anodin et nous place aussitôt dans une ambiance un peu spéciale du genre de celle qui laisse planer que ce titre n’aurait pas été choisi au hasard. En effet, on  aurait pu opter pour la bitture de bronze, au vu de certaines dernières mi-temps,  l’aiguillot de vermeil pour les barreurs tout en dentelle ou encore la vergue d’acier pour les skippers, les vrais.

Non, le lac d’argent avec  sa connotation un poil succube – pourquoi d’argent, mystère ! – sonne favorablement à nos oreilles et donne envie d’y aller en signant de son sang la fiche d’inscription.

 

  • Tu fais quoi dimanche ?
  • Je fais le lac d’argent.
  • Ah la vache le bol !
  • Ah non le bol c’est sur le Léman et en or mon gars !

Faut pas tout mélanger.

 

Sur le lac d’Annecy dont l’environnement hyperréaliste continu de bluffer les voyageurs, il fallait comme frontispice d’une régate inscrite tantôt nationale, tantôt mondiale et cette fois régionale, un intitulé capable à lui tout seul de vous embarquer  sur des eaux qui inspirent le respect,  force la modestie mais vous engage aussi derrière le miroir.

Car au fond…

Photo © Claude Beauduc